Pauvres de nous

Actions sociales à Namur hier et aujourd’hui

L’hospice d’Harscamp qui ouvre ses portes à Namur en 1812 est représentatif du mouvement de médicalisation qui se joue alors à l’échelle européenne. Les médecins et pharmaciens engagés par les institutions de bienfaisance tirent profit d’une formation professionnelle de plus en plus spécialisée. Pour sa part, le personnel infirmier continue à être recruté parmi des ordres religieux,  dont le dévouement jour et nuit reste le principal atout.

D’emblée, le bâtiment qui abrite l’hospice d’Harscamp répond aux préceptes hygiénistes de l’époque : le règlement prévoit des infirmeries distinctes pour les hommes et les femmes et une aération des chambres 4 heures par jour. Au XIXème siècle, l’assainissement de l’air est considéré comme le meilleur moyen de lutter contre miasmes et épidémies. L’article 10 stipule, en outre, que « l’ancienne draperie du couvent des récollets, et qui est isolé des autres est réservé pour, au besoin, servir aux maladies contagieuses ». Dans ce nouvel environnement, il n’est pas étonnant que la direction d’Harscamp se montre soucieuse, dès la seconde moitié du XIXe siècle, de dresser un relevé systématique des pensionnaires malades, ainsi que des types et causes des affections.

En 1866, Namur est frappée par une épidémie de choléra. En ville, la maladie touche 1075 personnes et tue 501 d’entre elles. L’insalubrité des rues dépourvues d’égout, la promiscuité, le manque de nourriture et d’hygiène sont identifiées comme les causes essentielles de la propagation de la maladie, qui fait de nombreuses victimes au sein des hospices Saint-Gilles et Saint-Jacques. Implanté dans le quartier Saint-Nicolas où le choléra s’avère particulièrement cruel, l’hospice d’Harscamp échappe pourtant à l’épidémie. C’est qu’il prend rapidement des mesures pour diminuer les risques de contagion. Il supprime sa basse-cour, fait vider la fosse à fumier, augmente les rations de viande destinées aux pensionnaires et nomme un médecin-adjoint. Durant l’été 1866, un seul décès est à déplorer à l’hospice et n’a rien à voir avec le choléra.  

Conçu au début du XIXe siècle dans une préoccupation de médicalisation croissante, l’hospice d’Harscamp sera progressivement rattrapé dans ce domaine par les autres institutions namuroises. Il n’empêche qu’il aura fait figure d’exemple en matière de prévention d’épidémies aux effets jadis effroyables.

SOURCE : MORTIER, J., L’hospice d’Harscamp au XIXe siècle : vers une médicalisation et une hygiénisation ?, séminaire d’histoire contemporaine, UNamur, 2015.